Sortie sur les pas de Néanderthal, de César, de Charles Martel et de quelques autres.
Samedi matin 22 septembre 2007, nous sommes tous prêts- 55 participants- pour un départ matinal vers le pays lotois de la Dordogne. À deux pas de la Garonne, fidèles à notre point de rassemblement fétiche du théâtre Sorano, nous ne nous posons pas la question de démêler lequel des deux cours d’eau, au confluent girondin, a réellement creusé le dernier sillon vers l’Atlantique. Il faut dire que ce matin-là, nous avons eu quelques frayeurs pendant une bonne demi-heure d’attente. Grâce à la réactivité de notre président René Javelas, secondé par Odette Molinié et par Francis Dabosi, tout s’est résolu au mieux .Notre chauffeur qui s’était trompé de lieu de rendez-vous , a ensuite si bien maîtrisé le parcours, qu’arrivés à Martel, après un arrêt technique à l’aire des Causses prés de Labastide Murat, nous étions rentrés ˝ dans les clous ˝. Le marché du samedi nous y attendait sous la halle moyenâgeuse devant l’imposante Raymondie où les vicomtes de Turenne faisaient administrer la petite ville et rendre la justice de leurs fiefs ˝autonomes˝ jusque sous Louis XV. De la cité aux 7 tours on n’aperçoit pas la Dordogne et pourtant c’est un de ses gués, connu depuis les temps très antiques, qui explique une succession d’évènements historiques marquants qui se sont déroulés ici au fil des siècles .
Charles Martel a-t-il poursuivi les armées maures jusqu’ici ? C’est légendaire mais ce n’est pas inimaginable. Depuis longtemps on a l’obligation de transiter par ces causses arides et vallées riantes entre Aquitaine et Languedoc. Henri Court-Mantel, frère de Richard Cœur de Lion et fils d’Aliénor, est mort là en 1183, dans la maison Fabri, après le pillage de Rocamadour, en attendant le pardon de son père qui lui parvint aux derniers instants. Odette, qui a longtemps géré le collège local-en laissant d’autres souvenirs !- se retrouve chez elle et les étalagistes l’interpellent amicalement.
Jules César lui, poursuivait Luctérius et se devait de conclure définitivement la guerre des Gaules. A Uxellodunum (aujourd’hui le Puy d’Issolud) il vint à bout de cette dernière résistance et - bon prince - se contenta de faire trancher la main droite des vaincus. Francis a travaillé avec ses étudiants en métallurgie à l’identification du site. Il nous présente ce dossier historique tandis que le car longe l’escarpement du camp fortifié entre le causse et la large plaine marécageuse de la Dordogne (voir en annexe).
Avant le déjeuner, nous avions prévu de faire un petit crochet par la Chapelle aux Saints. Ce détour en Corrèze n’a d’autre but de dévotion que la découverte du petit musée dédié à l’homo- néanderthalensis. C’est là en effet que fut découvert un squelette dont les rites d’ensevelissement ne laissaient aucun doute sur son humanité. Après vérification c’était en effet un Néanderthalien au pays des Cro-magnons !! Ce fut pour nous l’occasion de réviser nos ancêtres et de nous poser cette question d’actualité : les Néanderthaliens étaient-ils une autre espèce humaine non inter- féconde avec l’homo Sapiens ? Cela semble acquis, comme l’est aussi une très longue cohabitation, avant une disparition dont on ne connaît les causes (Cro-Magnon avait-il la dent dure ?) Nos hôtesses charmantes nous réservent un accueil très chaleureux et efficace puisqu’en une grosse demi-heure elles réussissent à nous informer et à nous passionner sur cette question .
Il était temps alors de se restaurer un peu. A 13 heures l’auberge Lou Cantou à Loubressac nous attend et nous régale de manière très conviviale.
Le temps s’est gâté pendant le repas, une averse est tombée mais ce ne sera qu’une alerte sans suite. Cependant le panorama magnifique sur la Dordogne, sur le château de Castelnau et sur les tours de Saint Laurent (musée Lurçat) se dérobe dans la brume. Après un tour de village, un peu endormi en cette fin d’été mais aux rues très fleuries, il nous reste 10 km avant la dernière étape.
Foin des temps obscurs, nous abandonnons le Moyen Âge et c’est à Montal que la Renaissance nous attend. Derrière son rideau de peupliers, ce château de la Loire en Quercy se dissimule jusqu’au dernier instant. Ensuite c’est une découverte et une visite enchantée : cour dont les sculptures en haut et bas-relief sont saisissantes, bustes de famille criant de vérité, exprimant d’abord la lignée seigneuriale mais aussi les âges, les caractères, les peines et les joies. Á l’intérieur un escalier unique où le revers des marches s’exalte en ornements de plus en plus fins tout en montant vers le palier du haut d’où l’on découvre un magnifique jardin de buis. Les pièces sont meublées, d’abord par des cheminées exceptionnelles, dont l’une a d’ailleurs été pendant un temps échangée avec Azay-le-Rideau, mais aussi par du mobilier d’époque dont des tables de dimensions inhabituelles et de bois de noyer magnifique. Et tant d’autres merveilles ! La Joconde elle-même ne s’y est pas trompée puisqu’après avoir orné la chambre de Léonard puis celle de François 1er, elle a daigné séjourner 2 ans - un tant soit peu contrainte et forcée - en 1943 et1944 dans ce château où rien ne pouvait la heurter. C’est à Maurice Fenaille (1855-1937) que l’on doit le sauvetage de ce patrimoine exceptionnel dont il a fait don à l’Etat. Le Président Poincaré en reçut les clés en 1913 et c’est seulement en cette année 2007 que tout usufruit a été définitivement cédé par la famille du fondateur.
Après cette longue journée il fallut rentrer à Toulouse ; l’autoroute n’était qu’à 30 km, c’était tout à fait confortable. Avant ce départ nos amis amopaliens-31 nous ont fait l’honneur et le plaisir de prendre le verre de l’amitié dans notre jardin de Saint Jean Lespinasse, à l’ombre d’une tour-escalier du XVème siècle.
Merci à tous ceux qui ont partagé cette journée en espérant qu’ils auront l’envie d’approfondir une autre fois la découverte de ce pays ˝ coincé ˝ entre Périgord, Auvergne et Quercy. En attendant de nouvelles et inévitables invasions pacifiques, il a su préserver sa tradition d’ouverture et de sérénité.
Louis et Suzanne Galtié.